Music & Me - Part 1
Je suis une mélomane d'une espèce rare. Du moins est-ce ce que de plus en plus mon entourage m'amène à constater.
Mais lisez-en plutôt l'explication.
J'ai été baignée dans la musique dès mon plus jeune âge. En effet, à l'aube de mes 7 ans, je fus inscrite en cours de solfège. Mes parents avaient alors à l'époque la naïveté de voir en moi une future virtuose, capable de rendre combles toutes salles de concerts, et de faire se soulever plus hauts encore que les lointains plafonds de ces salles des tonnerres d'applaudissements. Mes parents ont eu la chance d'avoir eu une enfant sage et obéissante telle que moi, lesquels défauts, -oui j'ai bien dit "défauts"- m'ont valu d'endurer assidûment pendant de longues années ce pénible exercice consistant à scander des ronds et des signes tous plus bizarres les uns que les autres inscrits sur des lignes dont le parallélisme et la rectitude n'enlevaient rien à l'atmosphère bien trop stricte des cours.
Il est assez intéressant de remarquer la touche d'ironie qu'il y avait dans le fait que ma mère s'échine chaque semaine à m'amener à des cours qui avaient lieu à 25km de l'endroit où j'habitais. Tandis que cela la contraignait de m'attendre patiemment, que dis-je? impatiemment dans la voiture pendant une heure la fin de la leçon, moi je me terrai dans mon silence n'osant pas lui révéler ce qu'au fond sans doute elle aurait voulu que je lui dévoile enfin: "Maman, je ne serai jamais une star de la musique, je déteste les cours de solfège auxquels tu m'as inscrite. S'il te plaît, cesse ce calvaire que j'endure (que nous endurons [aurais-je pensé intérieurement])." Aujourd'hui quand j'y pense, je ris de me sentir coupable de la perte de temps que je lui ai causée.
Mon enfance musicale est également marquée par ces longues sorties que je faisais en voiture, accompagnée de la petite famille. Mon père et ma mère, toujours sans s'en rendre compte, m'imposaient leur musique fort ringarde à mon goût, mais que le temps m'apprit à apprécier. Je me rappelle qu'ils aimaient s'improviser chanteurs et entonnaient à tue-tête leurs Hervé Vilard et autres Jean Ferrat. Le plus drôle était quand ils se retournaient de temps en temps pour nous faire leurs têtes obstinément déconfites de ceux qui ne comprennent pas que l'on puisse ne pas être emporté par de telles mélodies. Mes frère et soeur et moi-même nous regardions ensuite, constatant désespérément la distance qui nous séparait de ce binôme.
Vint ensuite l'âge de mes neuf ans, où il m'a fallu choisir un instrument afin de commencer l'exercice pratique découlant du pénible apprentissage du solfège. Je vous invite à vous rendre compte du scandale que cela peut être pour une jeune enfant incrédule de sept ans comme moi, que de penser en rentrant le premier jour dans une académie de musique, pouvoir ressortir de celle-ci en ayant joué d'un instrument. Non, au lieu de cela, deux années de ta vie te sont ravies, deux interminables années où ta seule ration consiste en cette lecture scandée à la manière des automates. Tu as pitié de ce professeur qui a peine à exprimer, devant une assemblée de minois déjà flétris par le flagrant constat, que la musique c'est ça, cette lecture de notes privées de tout son, une portée lue dans la cacophonie due au mixage des bons et moins bons élèves, de quoi te dégoûter pour la vie de la musique.
La suite dans "Music & Me - Part 2"