Col Mao
Julien Green a raison quand il écrit que la plupart des hommes trahissent leur jeunesse. C'est une réalité - très souvent en tout cas - qui m'intrigue depuis longtemps. A vrai dire la chose m'inquiète également. Et si, à mon tour, arrivé à "maturité", je trahissais ma jeunesse ? On peut d'ailleurs se demander ce qu'est "trahir sa jeunesse". Quand Cohn-Bendit fait le coup de poing avec les CRS en 68 et que, quelques années plus tard, il nous explique avec conviction les bienfaits de la Constitution Européenne : trahit-il nécessairement sa jeunesse ? On peut multiplier à l'infini les exemples de ceux qui sont passés du col Mao au Rotary selon le titre du livre de Guy Hocquenghem - Lettre à ceux qui sont passés du col Mao au Rotary -. Ils sont spontanément perçus comme des traîtres. Certains, tels Serge Halimi par exemple, pensent que le parcours de ces personnalités traduit plus un accomplissement qu'une rupture. La pratique du pouvoir aurait en fait révélé leur nature véritable. La jeunesse a-t-elle nécessairement raison ? Est-elle forcément aveuglement ?
C'est une question qui me paraît essentielle. Sans avoir de certitude quant à ma propre opinion, j'avoue avoir beaucoup d'admiration pour ceux qui en sont "restés au col Mao". Après tout Hugo nous apprend bien que les "utopies sont les vérités de demain".