Côte d'Ivoire - Togo - réponse à Elf
Elf avait posé une question très intéressante le 12 mai dernier et malheureusement Yann et moi n'avons pas pris la peine d'y répondre. Nous nous en excusons vivement et tâchons au travers de ce message de remédier à cette méprise, en espérant que notre cher elf acceptera nos excuses. Christian, je ne suis pas sure de bien maîtriser le sujet mais je vais quand même essayer de t'apporter une réponse. J'appelle tous les lecteurs de THE BLOG à me le signaler s'ils estiment que certains de mes jugements ne sont pas corrects.
Pour rappeler ce dont il était question, elf demandait: "Comment analyser les événements du Togo et de la Côte d'Ivoire? Ne constituent-ils pas pour les peuples (les dirigeants c'est une autre affaire) le début d'un sursaut? Le prélude à ce qui pourrait être une révolution?"
Pour ma part, elf, je répondrais que non. Je pense que les crises que traversent ces 2 pays sont des crises qui ont pour origine davantage une action de la classe politique qu'une action du peuple.
Prenons la Côte d'Ivoire.
Nous sommes d'accord que même si les actions rebelles en général sont souvent violentes et illégitimes, elles n'en sont pas moins une expression de factions entendant réaliser ce que l'unanimité du peuple africain souhaite faire mais ne fait pas: se soulever. L'un des problèmes en Côte d'Ivoire -et celle-ci n'est pas isolée- réside dans le fait que les actions rebelles, même si elles sont d'abord et fidèlement l'expression d'une opinion du peuple, très vite se détachent de celui-ci au profit d'affinités plus affirmées avec le classe politique, laissant finalement libre cours aux favoritismes douteux qu'on lui connait. Je pense que malheureusement ce sont en partie ces favoritismes qui entraînent les rancoeurs mutuelles et qui installent la crise ivoirienne dans la perpétuité. On ne peut pas appeler cela sursaut du peuple ou révolution, quand ce sont les dirigeants et les chefs rebelles qui manient la crise et l'entretiennent. Le non respect des accords de Marcoussis l'attestent.
Concernant le Togo, là encore on a un exemple parfait de ces misérables pays africains dont la gorge est nouée par le garrot militaire. Il est vrai que la pression du peuple, mais surtout la pression internationale, ont eu raison de l'autoproclamation de Eyadema fils, mais cet incident ne peut en aucun cas déstabiliser la toile construite par feu Eyadema père. Les conditions dans lesquelles se sont passées les élections ainsi que leur résultat en attestent.
Un véritable sursaut du peuple et un réel espoir pour l'Afrique surviendront lorsque d'un soulèvement de masse populaire résultera une déstabilisation sans précédent et irréversible de la classe politique, sans précédent et irréversible car contagieuse, endémique et incurable. Cette encore virtuelle épidémie marquera l'histoire de l'Afrique de son sceau, en ce sens qu'elle sera la première étape d'une refonte complète ainsi que d'une toute nouvelle manière de penser la conduite politique et économique d'un pays africain. Cette épidémie, bien plus qu'historique, sera "mentalitaire" et fermera la dernière page d'un livre pour ouvrir la première page d'une encyclopédie du renouveau économique, "mentalitaire" et "psychonationnel" de l'Afrique.
Pour ma part, je pense intimement que cette implosion "mentalitaire" peut commencer demain. Ma naïveté m'a même peut-être empêché de voir qu'elle avait déjà commencé et continue de sourdre lors de moments comme la marche pour l'esclavage organisée demain à 14h à Paris.Tout ça pour dire que ce sont davantage des symptômes comme ce dernier, plutôt que les agitations ivoiriennes et togolaises qui contribueront à éradiquer les virus dont nous plaignons l'Afrique aujourd'hui. Je suis pour le combat du virus par le virus, mentalito-progressiste celui-ci. Voilà c'est dit.
Espérant avoir répondu à ta question, elf, et restant à l'écoute (à la lecture devrais-je dire) de vos remarques...
NYTM